Des films d’amour à l’eau de rose, des robes de chambre rose et des petits gâteaux, on se croirait en plein dans un pyjama party de film. Et moi, je suis un peu le mouton noir de la bande. En fait, on ne peut pas vraiment dire que je me tienne vraiment avec ces filles. C’est Ron qui m’a dit que je devrais faire des efforts et que ça serait sympa de ma part si je m’entendais bien avec les copines de ses potes. Sauf que j’essaie toujours de trouver des points en commun avec elles. Ce n’est pas une tâche facile ...
« Et toi Mallory, qu’est-ce que tu donnes à Ron pour la St-Valentin ? » Je sors de la lune et je rapporte mon regard sur son visage élancé avec ses bouclettes blondes qui tombent de chaque côté. Tous les visages sont tournés vers moi et je sais que je dois faire attention à ce que je répondrai car ma réponse sera jugée.
« Je ne sais pas trop ... c’est notre première st-valentin ensemble alors je n’ai pas encore choisi. » Lorelaï consulte ses amies du regard avant de se lever pour aller chercher son ordinateur portable. Elle cherche quelque chose et tourne ensuite l’objet dans ma direction.
« Tu devrais te joindre à nous, regardes ce qu’on donne à nos hommes, nous. » Elles rigolent d’un air fier alors qu’elle fait défiler des photos osées d’elles sur le petit écran. Je suis sans mot. En fait, le seul bruit qui sort de ma bouche, c’est un rire nerveux. Je repousse mes lunettes du bout de l’index et je cherche un moyen de m’évader. Aidez-moi quelqu’un.
« Je ne crois pas que ... » Rire nerveux, je rougis.
« Oh, elle est timide! » Et elles se mettent à ricaner ensemble. Je sens une chaleur me monter au visage mais ce n’est pas tant la gêne, mais la frustration qu’on me prenne pour une poule mouillée.
« C’est bon ,je vais le faire! » Lorelaï pousse un cri de victoire et se lève en trombe pour aller chercher su maquillage et tout le nécessaire pour me préparer. Attendez ... on fait ça là ? Tout de suite ? Maintenant ? Hahahahaha ... nope. Oui ? J’ouvre la bouche, surprise, mais je la referme aussitôt. Je ne peux pas me dégonfler.
« Tiens, va enfiler ça ! » Elle me pousse presque dans la salle de bain avec un déshabillé dans les mains. Un morceau de vêtement qui ne couvre pas assez de peau à mon goût, vous voyez ? Je tente de regarder mon reflet dans le miroir mais je réussis à peine à me voir étant donné qu’elles m’ont enlevé mes lunettes. C’est sans doute mieux ainsi, ça va m’empêcher de regarder le moindre défaut que je trouve sur mon corps. Mon corps qui sera bientôt vu par trop de personnes. Je n’aime pas ça.
« Malloryyyyyyyyyyyy ? Tu viens ?! » « Oui, une seconde ! » Une fois le déshabillé mis, je ferme les yeux et je reprends mes esprits. Je prends mon courage à deux mains et je sors. On me balance directement devant la caméra et je n’ai à peine le temps d’être mentalement prête que le flash m’aveugle. Les premières photos ne sont pas réussites mais les filles commencent à me complimenter et à me donner des conseils. Petit à petit, je prends confiance et ça se voit sur les photos. Au point même que j’en viens à apprécier le résultat. J’espère simplement que Ron va les aimer.
{ ... }
Aujourd’hui, c’est une journée parfaite. Il fait beau et je me sens sur un nuage. Ron a adoré son cadeau de St-Valentin, les filles ont eu une idée d’enfer. Je n’ai jamais été tellement à l’aise avec mon corps alors je dois avouer que ça m’a fait pas mal de bien d’avoir un retour positif de sa part. Recevoir l’approbation de quelqu’un, c’est toujours plaisant. Je gambade presque sur le terrain de l’école alors que je m’approche des portes principales. En passant devant Angus, le pote de Ron, je l’entends me siffler.
« Joli ton grain de beauté. » Lorsque je tourne la tête vers lui, je vois qu’il pointe l’intérieur de sa cuisse. Il ne me prend pas plus de temps pour comprendre que Ron lui a montré les photos. Je lui tourne le dos et j’accélère le pas jusqu’à l’entrée de l’école, fâchée. Il ne peut vraiment rien caché à son meilleur ami ? Il se croit vraiment obligé de tout partager avec lui ? Ces photos, c’était quelqu’un de personnel entre lui et moi, pas quelque chose qu’il devait partager avec ses potes. Attendez que je lui trouve, lui !
« Hey, Mallory! » Tout le monde me regarde et se mettent à chuchoter. Certains garçons se mettent même à imiter les poses que j’ai prises lors de la soirée. Les filles rigolent en me regardant du coin de l’œil alors qu’elles se disent des ragots, entre elles. Je comprends alors que Ron n’a pas que partager les photos avec son meilleur ami, il les a partagées avec l’école entière. Je veux mourir. Les rires autour de moi s’intensifient, mes yeux s’embuent et mon visage tourne rouge tomate. Je me mets presque à courir jusqu’à la salle de bain la plus proche, poussant tout le monde sur mon passage. Je m’enferme dans une cabine en remontant mes jambes sur la cuvette pour ne pas que l’on me voit, je veux disparaitre. je me demande sincèrement comment je vais faire pour sortir d’ici sans que l’ont me voit et je ne veux même pas imaginé ce que seront les prochains jours.
« Mallory? » dit une voix après avoir ouvert la porte de la salle de bain. J’arrête de pleurer, pour ne pas que l’on m’entend.
« Mallory, c’est Gladys. Sors ma belle, tout le monde est dans leur classe ... » Gladys, c’est la secrétaire de la directrice. Une bonne femme très sympathique qui ne ferait pas de mal à une mouche mais qui sait replacer les élèves les plus difficiles. On peut lui faire confiance. Honteuse, je sors de ma cachette, les yeux gonflés.
« Oh, ma belle ... » Elle me prend dans ses bras et tente de me réconforter mais j’ai l’impression que ce contact rend la chose encore plus difficile, j’éclate de nouveau. Elle m’accompagne jusqu’au bureau de la directrice où on passe un appel pour appeler mon père. Je ne sais sincèrement pas ce que je vais lui dire lorsqu’il sera ici, je n’ai pas envie qu’il me voit dans cette position. Le temps passe et il finit enfin par arriver. Lorsque la porte du bureau s’ouvre et que je lève mon regard piteux vers lui, en larme, je vois qu’il n’est pas fier de moi. Mais son regard s’attendrit aussitôt qu’il voit dans quel état je suis et il se dépêche de venir vers moi pour me prendre dans ses bras.
« Papa, je suis tellement désolée ... » Je cache mon visage dans son cou en recroquevillant mes bras contre ma poitrine, le laissant serrer mon corps en entier contre lui. Pendant un court instant, je me sens en sécurité. Sauf que ça risque d’être pas mal plus difficile de vaincre mes démons, cette fois-ci, que de vaincre les dinosaures qui m’attendent au tournant de l’escalier lorsque je veux aller à la salle de bain la nuit ...
{ ... }
Drinnnnnnnnnnng. Drinnnnnnnnnnng. Je lève la tête en écoutant pour voir si mon père se lève pour le téléphone. Aucun bruit.
« J’y vais ! » Je me lève pratiquement en sautant et je cours jusqu’au téléphone avant que la ligne ne raccroche.
« Allô ? » J’entends des gens parler au fond mais personne ne me parle à moi.
« Allô ?! » Une femme se racle la gorge avant de finalement prononcer quelque chose : [color=mediumvioletred] « Désolée, je crois que je me suis trompée de numéro. »[/b] Lorsque la ligne raccroche, je reste debout face au téléphone sans rien dire. Cette voix, je suis certaine de déjà l’avoir entendue. Quand j’étais jeune, j’aimais beaucoup répondre au téléphone à la place de mon papa. Quel enfant n’aime pas ça ? Et je suis certaine que, au fond de mes souvenirs, cette voix a déjà appelé ici. Et je suis presque certaine que je sais de qui il s’agit. Cette personne que je ne connais pas mais à qui je dois la vie.
« C’était qui? » Je repose le combiné avant de me tourner vers mon amie :
« Je crois que c’était ma mère. » Cette réponse qui parait si étrange aux oreilles des autres. Comment on peut ne pas être certain qu’il s’agit de notre mère ? Cette personne dont on n’oublierait pas un détail aussi important que le son de sa voix ? Et bien c’est ce qui arrive quand votre mère se fou de vous.
« Pourquoi elle appelle ici, qu’est-ce qu’elle veut ? » « Je ne sais pas et je m’en fou. » Je me laisse retomber sur mon lit à côté d’elle, en fixant le mur.
« Tu ne l’as jamais rencontrée? » Je ne suis pas certaine d’avoir vraiment envie d’en parler mais, en même temps, ça pourrait me faire du bien. Disons que ce n’est pas un sujet que j’aborde souvent. Mon père a fait du bon travail mais j’avoue que y’a des fois où j’aurais eu envie d’avoir une femme pour m’aider. Pour demander conseil à propos des garçons, etc. Ces conversations que je ne me voyais pas avoir avec mon propre père, mais s’il était comme mon meilleur ami pour moi.
« Non. Et je n’en ai pas envie. » Rendue à mon âge, je me disais que ça ne servait plus à grand chose. J’avais eu besoin d’elle lorsque Ron m’avait détruite. Quand j’étais jeune et que j’avais tout un tas de questions sur la vie. Ce n’est plus maintenant, pratiquement à l’âge adulte, que j’avais besoin d’elle. J’avais réussit à m’en sortir sans elle et j’étais maintenant assez grande pour continuer de le faire. De toute façon, ma mère ne représentait rien pour moi. Tout comme pour elle, je n’avais été qu’un objet dont on se débarrasse quand on n’en veut plus. Comme une vieille chaise berçante. Au fond de moi, je lui en voulais de s’être dégonflée. Je comprenais les circonstances qui englobaient notre histoire, mais mon père était dans le même bateau qu’elle et lui, il n’avait pas abandonné. Ma mère, ce n’est qu’une lâche.